Géométrie existentielle ?

Nous avons l’habitude de dire que l’espace dans lequel nous vivons est euclidien : en particulier, deux droites à angle droit d’une même droite ne se coupent jamais (ce qui correspond au 5ème postulat d’Euclide). Cela semble totalement anodin et évident. D’ailleurs, la plupart de nos travaux dans le plan et dans l’espace respectent cette condition ; le dessin d’architecture et le dessin industriel sont tous deux réalisés sur un plan qui respecte cette condition ; tous les cours de géométrie de l’enseignement général en France respectent cette condition ; le dessin artistique en perspective, si répandu, respecte cette condition ; les mathématiques de l’analyse et des statistiques utilisent habituellement des graphiques (courbe représentative d’une fonction, diagrammes) qui respectent cette condition. Pourtant, dans l’expérience commune de la vie, nous ne rencontrons jamais deux droites dites parallèles qui ne se coupent jamais, ne serait-ce que parce que nous ne pouvons pas le vérifier.

Nous pouvons ainsi émettre l’hypothèse que l’espace que nous vivons n’est pas euclidien, contrairement à celui que nous nous représentons, et nous poser la question de la géométrie de cet(ces) espace(s). Peut-être vivons-nous souvent intellectuellement dans un monde mental qui n’est pas en phase avec l’expérience du monde que nous avons. Il n’est pas question de remettre en question l’utilité et l’efficacité des travaux dans le plan euclidien, mais de retrouver, peut-être, une représentation mentale plus existentielle de l’espace afin d’en retrouver le sens et la bonne utilité.

Les enjeux concernent, je crois, avant tout l’espace relationnel : dois-je avoir la même relation avec un ami que je fréquente souvent et que je connais bien, et une personne que j’ai rencontrée seulement une fois ? Puis-je partager avec l’une et l’autre la même intimité ? L’actualité de ces enjeux née en particulier de l’expansion exponentielle des réseaux sociaux sur internet. Ensuite, l’espace « spatio-temporel » est évidemment concerné : concernant le temps, on se rapproche de la distinction opérée par Bergson entre le temps et la durée… Mais cette distinction peut certainement être poussée à l’espace géographique, compte tenu des moyens de communication matériels et immatériels actuels qui téléscopent complètement notre espace. Et même, à bien y réfléchir, il suffit de constater qu’un objet de 10 mètres d’envergure ne nous apparaîtra pas aussi imposant s’il est situé à côté de nous ou s’il est à 3 km de nous. Encore, la géométrie de la connaissance est aussi concernée, ce que révèle par exemple l’étonnante efficacité des cartes heuristiques, dont la géométrie n’est clairement pas euclidienne, pour la mémorisation.

J’espère approfondir ces questions prochainement, peut-être suite à l’étude de l’espace vécu selon Husserl ou d’autres phénoménologues. J’espère aussi rendre plus concret cet espace géométrique vécu, qui me semble proche d’un espace hyperbolique, en poursuivant mes travaux de programmation informatique.

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